10/09/2010

Domaine De Chevalier en magnums 2000

Blanc sec, Pessac - Leognan, 2000

Commenté par Eloïse Heeter-Tari, Château Nairac

Au moment de me confier la présentation de ce cru, plusieurs pensées jaillissaient dans mon esprit…

L’esprit de Chevalier, sans doute, ou la mémoire déjà … réminiscence de Platon ou petit miracle de la mémoire heureuse de Ricoeur.

Les hommes d’abord.   Avec non pas une, ni deux, mais trois personnes …

Avec la disparition de Thierry Manoncourt, il y a dix jours maintenant, impossible de ne pas évoquer cette délicieuse personnalité ou comme le disait le Père dans son homélie son incroyable « qualité de présence ». Par inadvertance, Matthieu Cuvelier étant empêché, j’avais eu la chance de réaliser entièrement son interview pour le livre et le film « Bordeaux en mouvement » ; plus de trois heures d’une intensité rare à Figeac.

Or sans Olivier Bernard, vice-chancelier de l’Académie, gérant du Domaine de Chevalier, propriété de sa famille depuis 1983, ce projet n’aurait pas vu le jour, à tout le moins sous cette forme, avec la volonté de « prendre appui sur le passé pour le futur » comme l’indiquait Olivier ABEL à Malagar.

Mais le lien ne s’arrête pas là… tant la filiation avec Claude RICARD, autre figure du vin de Bordeaux, me revenait aussi en mémoire, en particulier dans la recherche de « perfection ». Pianiste de talent, « la mode du jeu rapide ne lui convient pas : c’est l’émotion et la nuance qu’il veut privilégier ». De la musique au vin, la transition vient naturellement.

Le vin ensuite
Le « viticulteur le plus maniaque de Bordeaux » a inculqué à son successeur l’art de faire un grand vin blanc sec, de garde, d’une fraîcheur incroyable. Notre homme compare d’ailleurs le Montrachet à Sophia Loren, la sensualité à l’état pur, quand Chevalier, selon lui, ressemble à Audrey Hephburn. A vous d’apprécier !

Un chevalier, « Chibaley » en Gascon, nom porté sur la carte de Belleyme en 1763 attestant de l’ancienneté de la propriété, relèverait le défi ; je m’en garderai pour évoquer :

un vin d’équilibre, rare, né de seulement 4,5 hectares sur les terres de Pessac-Léognan, intense, vif, avec 70 % de sauvignon, riche & long, grâce à 30% de sémillon.

Emotion à partager, Temps « capturé, captif mais libre »,  avec les mots de Sophie Guermès

« Cet instant saisi…lorsqu’il naît, porte déjà en lui une mémoire, celle de tous les moments qui ont précédé sa création, depuis la manne jusqu’à l’assemblage, puis de la barrique à la bouteille. (…) Plus le vin est grand, plus il retient le meilleur d’un moment, d’une terre, d’un climat ; il rassemble ces fragments d’où naît une harmonie ».

Puisse chacun de vous garder quelque chose d’impérissable de cette soirée, à l’instar de la madeleine de Proust ou du Festin de Babette.