04/02/2004

Château Batailley 1989

Rouge, Pauillac, 1989

Commenté par M. Daniel Lawton

Un pic, un cap, une péninsule… Cyrano s’enorgueillit des dimensions formidables de son nez. Quoiqu’il s’allonge aussi énormément que la jactance de son porteur, celui-ci, ô scandale, ne se vante d’aucun odorat ; bien qu’elle fanfaronne aussi volumineusement, sa bouche cause mais ne s’arroge pas de goût (Michel Serres)

Le Château Batailley est un superbe domaine de plus de 50 hectares de vignes avec un encépagement très classique : 70 % de Cabernet Sauvignon, 25 % de Merlot, 5 % de Cabernet franc.

Depuis le milieu du siècle dernier, il appartient à la famille Borie et par alliance à la famille Castéja.
Son histoire a un grand intérêt car il fut acheté, en 1818, par la célèbre famille Guestier, puis par une famille de financiers, les Halphen.
J’ai toujours été étonné de constater qu’à la suite de la famille Rothschild qui a acheté Mouton en 1853, puis Lafitte en 1868, et peut-être encouragées par elle, plusieurs familles de banquiers, se sont installées dans notre région, plus particulièrement en Médoc.
Ainsi trouve t’on les Pillet-Will à Château Margaux, les Koenigswater au Tertre, les Péreire à Palmer, les Heine et les Achille-Fould à Beychevelle. Aucune de ces familles n’a su ou n’a pu conserver ces propriétés au-delà du siècle dernier. Ce qui prouve la difficulté des temps à l’époque de nos parents et grands-parents.

1989 fut une année précoce et très chaude. J’ai noté une grande similitude entre 1989 et le millésime 2003 que nous venons de récolter ; d’abord la chaleur caniculaire. La date de la floraison se situe fin mai. Ce qui est précoce.
Nous sommes en pleine canicule vers le 19 juin avec un Vinexpo écrasé de chaleur. Cette sécheresse va se poursuivre en juillet. Il a fait vers le 17 juillet des chaleurs très élevées situées entre  34° et 36° C ; et le beau temps a duré jusqu’en septembre.
En 1989, les vendanges ont commencé en août. Ce fut une année magnifique.

Le Château Batailley 1989 a bénéficié de ce temps exceptionnel. J’ose à peine en parler parce qu’il faudrait normalement expliquer le bouquet qu’il a, le goût qu’il a, aussi bien que l’a fait Michel Serres tout à l’heure au cours de sa conférence. Je voudrais avoir une partie de son talent pour exposer ce que j’ai ressenti.
Je dis simplement ceci : ce grand vin a une belle couleur rubis, pourpre, un bouquet de cassis très mûr avec une pointe assez tannique. C’est un vin très « masculin ». Il est  puissant, corsé, mais harmonieux. C’est un vin ample, de style traditionnel et, pour tout résumer, il me semble qu’il est au sommet de sa forme.