09/11/2010

Château Pichon Longueville 2004

Rouge, Pauillac, 2004

Commenté par Jean-Pierre Rousseau, Société DIVA

Mesdames, Messieurs, Messieurs les Ministres, les Ambassadeurs, les Présidents, bonsoir,

Je reste très modeste parce que je ne suis ici qu’un modeste suppléant. Je vais essayer de remplacer tant bien que mal l’Honorable Comte de Lur Saluces qui, ce soir, n’a hélas pas pu venir jusqu’à cette contrée septentrionale qu’on appelle « Le Médoc ». Médoc, mais pas n’importe où en Médoc à Pauillac.

Je vous rappelle une fois une discussion avec un cinéaste qui se trouve être genevois. Et j’ai eu la mauvaise idée de lui dire que les Pauillac étaient parfois des vins un tout petit peu protestants. « Mais, que voulez-vous dire par là ? », « Les vins non dénués, avec parfois une certaine austérité », lui répondis-je. Bref nous avons fait la soirée là-dessus.

Mais Dieu merci, le Pauillac a grandement évolué depuis cette époque qui est maintenant révolue. Depuis l’époque, où en 1650, les Hollandais ont drainé le Médoc et notamment la région de Pauillac de manière à pouvoir en révéler les graves, profondes et magnifiques qui constituent le terroir de Pauillac et notamment du Château dont nous parlons aujourd’hui qui nous accueille avec magnificence, le Château Pichon-Longueville, également appelé « Pichon Baron ».
Pourquoi Pichon Baron ? Vous le savez tous ! Mais je le rappelle pour les étrangers ou les oublieux. Il y avait au milieu du XIXème siècle, cinq rejetons (trois filles et deux garçons) de la famille de Longueville qui avaient géré le domaine avec soin, depuis les années 1600. Il a bien fallu partager : les trois filles ont pris Pichon Comtesse.
J’en profite pour saluer ma voisine de table, May-Eliane de Lencquesaing qui a le courage de redémarrer une aventure extraordinaire, dans un autre hémisphère, après de nombreuses années passées à promouvoir l’appellation Pauillac et plus particulièrement, son Château (et ça restera toujours son Château) qui se trouve donc, exactement, en face de là où nous sommes.
Alors, Pichon-Longueville, ça m’amuse d’y revenir parce que j’ai rencontré, il y a une vingtaine d’années, des architectes qui ont construit ces bâtiments quelque peu pharaoniques, dirons-nous. Ils servent d’écrin au Château un tout petit peu disneyen parce qu’il a un côté cendrillon très XIXème, époque d’origine du Château. Dillon et de Gastines que j’avais connus à l’époque chez Michel Guérard étaient des gens de grande qualité et qui ont ensuite embrassé une très belle carrière.

Des gens qui ont eu cette qualité de construire ici une sorte d’introduction, de signifier la frontière entre Saint-Julien et Pauillac, puisque cette porte somptueuse, munificente marque bien cette différence ; sachant que les Châteaux aussi bien Comtesse et Pichon Baron bordent en quelques hectares l’appellation Saint-Julien, ces gens ont eu cette qualité d’allier sans doute la puissance des Pauillac et le raffinement des Saint-Julien, avec peut-être un léger exotisme propre à Saint-Estèphe. Mais bon, on ne va pas aller jusque là…
Il est important de rappeler qu’au début des années 80, Pichon-Longueville, à l’initiative de Jean-Michel Cazes, que nous ne saluerons jamais assez pour son travail effectué pour la promotion de Pauillac et de son Château Lynch-Bages, est, je crois, en Afrique du Sud ce soir, chez May-Eliane de Lencquesaing, au congrès des Relais & Châteaux.

Au début des années 80, AXA, à l’initiative de Jean-Michel, rachetait ce magnifique domaine qui fait maintenant 73 hectares, avec une dominante de cabernet sauvignon, à 62 %, à 35 % de merlot et à 3 % de cabernet franc, des vignes qui ont une moyenne d’âge de trente ans. On a tout ce qu’il faut pour faire la Rolls des vins.
Les compagnies d’assurances ne se sont pas arrêtées là. A une époque, on pensait même qu’elles allaient acheter tout Bordeaux. AXA a quand même investi au Portugal, en Hongrie et dans des contrées même aussi exotiques que la Bourgogne, le sud de la France et la Quinta Do Noval qui n’est pas le moins magnifique des vins d’AXA.
Ce 2004 que nous sommes en train de déguster, a un mérite celui de prouver, comme le disait Henri de Bourguignon, qu’on peut faire du très grand vin avec des rendements importants. Puisque quelque part, quand on est béni des Dieux, eh bien pourquoi ne pas accepter de transférer dans la bouteille ce qui est produit à la vigne !
C’est un 2004 d’une grande élégance qui est en ce moment en train de passer des arômes vers le bouquet avec le côté tendu du fruit et on commence à sentir un tout petit peu la patine des ans. C’est une très belle bouteille.
Je salue Monsieur Andreu que nous ne féliciterons jamais assez pour ses réalisations magnifiques dans un pays où il est important de montrer que nous ne sommes pas seulement des fabricants de parfums et de grands vins, mais aussi que nous avons quelques accointances et des technologies de pointe.
Merci de votre attention.