16/12/2004

Château Rieussec 1989

Blanc liquoreux, Sauternes, 1989

Commenté par Michel Garat

« Cette année 1708, il y eut très peu de blé, ou pour mieux dire presque point, et également du vin, lequel s’est trouvé merveilleux, et celui d’Haut-Brion s’est vendu 500 livres, et celui du Blayais 120 livres »

Avec le Château Rieussec, nous changeons de rive, de la rive du Ciron bien sûre ! Nous étions sur la rive gauche, nous passons sur la rive droite du Ciron à qui on doit nos brouillards d’automne et parfois d’hiver
Nous montons sur les coteaux de Sauternes, aux confins de Sauternes et de Fargues de Langon et nous sommes au Château Rieussec.
Le Château Rieussec est une propriété qui a appartenu pendant assez longtemps aux moines des Carmes de Langon qui en ont été délogés au moment de la Révolution. Après, un certain nombre de changements de propriétaires à des vicissitudes diverses, les domaines sont devenus la propriété des domaines
de Rothschild en 1984.
Ce vin a été suivi par Charles Chevallier. Responsable de Rieussec. Charles Chevallier a fait le chemin inverse de la famille Tari. Un jour, il est allé voir ce qui ce passait dans le Médoc tout en gardant un pied à Sauternes et aussi un petit peu de son cœur.
Nous le voyons souvent pendant les vendanges. Il faut dire que quand on a commencé à vinifier, à vendanger du Sauternes, on a du mal à pouvoir sans passer. C’est vraiment passionnant même si c’est difficile.
Rieussec, c’est une grande propriété de 90 hectares, sur des terres qui sont un petit peu différentes de celle de Barsac. Ce domaine se situe sur le coteau, sur des graves argileuses, un peu plus argileuses que les terroirs de Barsac.
Dans l’encépagement, même type d’encépagement qu’à Nairac : 90 % de Sémillon, 7 % de Sauvignon et 3 % de Muscadelle. La Muscadelle est un adjoint important dans le Sauternes.
Et toujours les mêmes vendanges par tries successives, toujours la même fermentation en barriques.
Le millésime 89, c’est un des 3 millésimes de la prestigieuse trilogie 88, 89, 90, d’une grande qualité et des quantités de production intéressantes pour Sauternes.
C’est, dans les 3 années, certainement l’une des plus aboutie puisqu’elle fait une parfaite synthèse entre l’élégance, la finesse, possédant la race du 88 et toute l’opulence du 90. C’est un grand millésime de botrytis avec un développement pratiquement uniforme et rapide, malgré les orages de grêle.
Si 96 était un millésime de vendangeurs patients, 89 est un millésime de vendangeurs pressés, c’est-à-dire dépendant du développement très rapide du botrytis dans la vigne.
Le Botrytis s’est développé à une telle vitesse qu’il a fallu vraiment parfois limiter les tries à leurs plus simples expressions, dans la mesure où l’ensemble du vignoble était gagné par la pourriture noble.
Ce 89, quant on le goûte, est totalement marqué par le botrytis c’est-à-dire qu’aussi bien au nez qu’en bouche. En couleur, il est plutôt vieille or, un peu moins ambré que le Nairac, malgré son âge.
Il a un nez magnifique qui est déjà ouvert, sur des notes épicées, croûte de pain d’épices, un peu de girofle, un peu de mandarine. Nous sommes dans cet univers de fruits et d’épices.
En bouche, on a cette même sensation, assez voluptueuse avec un vin très équilibré, sur des saveurs d’oranges confites. Les épices sont toujours présentes et on a en finale une amertume qui est tout à fait intéressante qui vient bien du botrytis. C’est l’amertume de l’amande et de la crème d’amandes qui relève l’équilibre total du vin et se termine même par une petite pointe mentholée.
A chaque instant où vous allez y plonger le nez, vous trouverez d’autres arômes, d’autres saveurs. C’est la magie du Sauternes.