16/12/2004

Château Suduiraut 1970

Blanc liquoreux, Sauternes, 1970

Commenté par Valentin Lillet

« Cette année 1708, il y eut très peu de blé, ou pour mieux dire presque point, et également du vin, lequel s’est trouvé merveilleux, et celui d’Haut-Brion s’est vendu 500 livres, et celui du Blayais 120 livres »

C’est une émotion à double titre pour moi de parler premièrement au niveau collectif parce que ce soir prend naissance la commission de réflexion des jeunes professionnels du vin de Bordeaux dans l’Académie et à titre personnel parce que mon métier consiste à faire du courtage et en règle générale je m’adresse à une seule personne à la fois. De m’adresser à un public aussi vaste est une tâche assez difficile pour moi et je compte sur votre indulgence devant ma fébrilité.
Château Suduiraut est un domaine de 200 hectares, dont 92 hectares de vignes qui est une propriété d’AXA depuis 1992.
En terme d’encépagement, on a une énorme proportion de Sémillon qui doit être aux alentours de 90 % qui donne à ce vin un gros aspect de chair, de gras de structure et une proportion de Sémillon d’environ 10%..
En terme de dégustation, les Sauternes sont des vins de défits, puisque ce sont des vins qui défient le temps de part leur longévité, leur aptitude à vieillir et de part un côté éternel.
Ce sont des vins qui défient le climat, les seuls dans le monde à attendre avec impatience la pourriture noble pour en extraire leur quintessence.
C’est un vin également qui défie tout type de gastronomie parce qu’on peut le boire en guise d’apéritif, sur les fromages, en dessert.
J’ai appris récemment et de sources assez sûres que le Baron Philippe de Rothschild était un adepte de la purée de poires fraîches avec un verre de Sauternes.
En dégustation, sur le millésime 70, la couleur est très orangée avec des notes très ambrées. Au niveau du nez, on a un aspect cire qui est vraiment prépondérant et en bouche on a surtout une trame acide qui balance bien avec l’aspect gras du vin et qui en fait un parfait équilibre.
Durant le millésime 70, les vendanges se sont passées dans un climat très classique ou s’entremêlent parfaitement l’acidité et le gras du vin.
Pour le millésime 82, le gras est beaucoup plus exubérant. Il est même prédominant et on sent vraiment en relief le Sémillon omniprésent.
Pour cette dégustation, 3 points sont importants.
Le premier point, c’est que les vins de Sauternes et les vins de Bordeaux notamment sur les millésimes 70 et 82 étaient issus de récoltes opulentes, volumineuses et de très grande qualité.
Le binôme volume-qualité existe bien à Bordeaux et il faut le faire savoir.
Le second point, c’est que nous avons des vins qui défient le temps qui ont une espérance de vie qui tend vers l’éternité. Des vins à boire quand on veut, quand on peut.
Le troisième point, c’est cette grande complexité des vins de Sauternes qui émerveille bien souvent et qui donne bien souvent du plaisir, tout simplement. Rendons hommage à toutes ces familles, tous ces hommes, toutes ces femmes qui font, qui effectuent un véritable sacerdoce.
Le marché des vins de Sauternes est rarement présent ou irrégulièrement présent en terme de commercialisation.
Nous leur faisons part ici de toute notre admiration, de tout notre respect pour cette perséverence dans le travail qui un jour sera récompensé.
J’aimerai dédier ces propos à une personne qui n’est plus là. Un homme de l’art au Château Suduiraut, Monsieur Alain Pascaud, Directeur technique, qui a œuvré ici de 1992 à la fin de l’année 2003 et qui est parti trop tôt en ce début d’année.