Dîner-conférence : CATHERINE PEGARD au Château Smith-Haut-Lafitte
J’ai été beaucoup plus souvent à l’écoute des autres que devant ceux qui allaient m’écouter. Et donc, à chaque fois, je me dis : « Mais, pourquoi ai-je accepté de faire cela ? », parce que, au fond, j’aimerais beaucoup plus vous poser des questions sur les vins de Bordeaux que vous parler ce soir de Versailles.
Mais je vais quand même essayer de le faire, et justement, je vais essayer de le faire avec mon sentiment à moi, avec ma manière de voir les choses. On a assez dit, quand je suis arrivée à Versailles, qu’au fond, je n’étais pas tout à fait faite pour cela et que mon parcours ne me prédisposait pas.
Alors, je veux justement mettre à profit le fait d’être différente pour peut-être porter un regard différent sur ce lieu, comme vous l’avez dit, unique au monde. Et je pense aujourd’hui qu’il faut regarder Versailles avec d’autres yeux parce que nous sommes dans le XXIe siècle, parce que la vie change et la vie change très vite. Et que donc, ce Versailles-là – il fallait donner un titre à cette conférence, nous avons parlé de Versailles et de l’art de vivre – j’aurais dû dire, c’est plutôt « Versailles dans la continuité jusqu’à nos jours ».
Et on voit que l’art de vivre, c’est peut-être ce qui nous rassemble le plus ce soir, et ce qui fait un lien facile et évident entre Bordeaux, l’Académie du Vin de Bordeaux, et Versailles. Mais Versailles, c’est aussi ce que cela inspire à ceux que nous rencontrons quotidiennement à Versailles et à ceux que nous allons voir quelquefois dans le monde entier.
Et c’est un petit peu tout cela que j’ai voulu essayer de vous dire, parce que, au fond, à Versailles, nous avançons sur un fil et c’est un fil fragile entre l’immuable et le conjoncturel. L’immuable, c’est évidemment ce château. Ce château qui a résisté à tout, aux caprices des monarques, à la Révolution, à l’indifférence du début du XXe siècle, aux abandons, et surtout, surtout à l’usure du temps, mais qui garde une place à part, exceptionnelle, je crois, dans notre univers collectif par-delà les frontières.
En fait, depuis deux ans que j’y suis, – c’est presque mon anniversaire parce que j’y suis entrée le 2 octobre – eh bien, depuis deux ans que je suis à Versailles, je me dis que ce lieu s’impose à nous, nous qui sommes au fond des hôtes de passage, nous qui venons le diriger pour un temps très bref si on compare à la durée de son existence à lui.
Eh bien nous, quelles que soient nos passions, notre conception de l’histoire, notre vision de l’avenir, eh bien c’est Versailles que nous devons suivre et ce n’est pas Versailles qui nous suivra.
Versailles, c’est notre socle. Tout part de lui, revient à lui. C’est ce qui en fait l’emblème de la culture française dans le monde comme en témoignent les visiteurs étrangers qui ne sont aujourd’hui, je crois, qu’au début de leur découverte de Versailles. 8 % de Chinois en 2012, il y en avait à peine 4 % deux ans plus tôt. 7 % de Brésiliens, pays jusque-là très peu représenté. Et ces nouveaux visiteurs de Versailles nous apportent un autre regard sur nous-mêmes et je crois qu’ils nous obligent.
Lieu patrimonial majeur, Versailles doit rester dans le XXIe siècle le lieu de la création, le carrefour de tous les arts, le symbole de l’art de vivre à la française. C’est pourquoi il me semble d’emblée vain d’opposer création et conservation. C’est un débat qui me semble obsolète pour le futur car c’est l’excellence de la conservation qui fait aujourd’hui l’excellence de la création. Cela me semble évident dans les travaux de restaurations et de remeublement qui nous occupent sans relâche, et je n’en prendrai qu’un exemple, le dernier, celui des appartements de Mesdames, les filles de Louis XV que nous venons de ré-ouvrir au printemps. Neuf pièces, neuf pièces où nous pouvons suivre les princesses quasiment dans leur vie quotidienne, dans leur bibliothèque, dans leur salon de musique, dans leur chambre et où on retrouve les objets qui faisaient leur quotidien.
La création stricto sensu des étoffes qui décorent ces pièces, eh bien, nous les devons à la maison Tassinari, à Lyon. Et je suis allée la semaine dernière voir les métiers à tisser de la maison Tassinari, il n’y a plus que deux femmes qui continuent à faire ce métier – des métiers à bras, comme ils étaient exactement faits, comme les tissus étaient faits exactement au XVIIIe siècle – deux femmes qui tissent 7 centimètres de tissu par jour ! C’est vous dire que s’il n’y avait plus les commandes de Versailles à Lyon, eh bien, il n’y aurait plus de métier à tisser à Lyon.
Plus spectaculairement encore, je citerai la maison Swarovski, qui a inventé un compromis entre les normes EDF et la lueur des bougies et ainsi, après un travail de six mois, on a pu créer une bougie à Versailles qui rend l’effet de la lumière des vraies bougies. Et donc, cela, c’est un brevet, un brevet Swarovski. Et donc, je pense aussi que, là encore, la création d’aujourd’hui et la haute technologie viennent embellir le passé.
Mais à l’autre extrémité, je dirais que l’art contemporain à Versailles n’affirme un sens que lorsqu’il fait écho au patrimoine historique. Je n’évoquerai ici que mes conversations avec Giuseppe Penone, dont l’exposition connaît le succès que vous savez. Si vous n’avez pu aller la voir, cela se termine fin octobre, il faut se dépêcher, c’est une très belle exposition.
Mais dès que je suis allée voir Giuseppe Penone, peu de temps après ma nomination, à Turin, nous avons, avant tout, parlé non pas de son œuvre mais de Versailles. Non pas pour savoir s’il fallait placer justement une œuvre ici plutôt qu’ailleurs ou si telle sculpture était indispensable à la compréhension de son travail. Penone, qui est pourtant une figure de l’Arte Povera – on pourrait penser que tout cela est paradoxal – a d’emblée travaillé sur le dialogue qu’il avait le privilège de nouer avec Le Nôtre et qui rend d’abord – comme il le dit lui-même – la perception de l’espace fondamentale.
C’était le sens de sa présence à Versailles. Penone est venu à Versailles avec son œuvre, mais Versailles ne s’est pas donné à lui. Il a posé son œuvre à Versailles et il se trouve qu’elle était juste à Versailles, mais Versailles n’a pas changé et Penone non plus.
Louis XIV avait voulu, je crois, que la création soit partout à Versailles. Et cela reste donc notre fil rouge pour aujourd’hui et pour demain. Versailles incarne cette permanence culturelle qui ne passe pas dans le contexte économique le plus incertain et le plus mouvant qui soit. Je ne reviendrai pas ici sur les restrictions budgétaires que nous subissons et dont nous ne pouvons même pas envisager la fin. C’est pour moi une inquiétude de tous les instants, mais je ne crois pas que je sois venue là, ici, ce soir, pour parler de comptabilité et pas pour vous dire qu’avec lucidité bien sûr, nous ne devons renoncer à rien.
Et je pense que si nous renonçons à quelque chose, nous nous laisserons aller à une dangereuse inertie, à une lente asphyxie. Mon devoir est de maintenir l’offre culturelle qui fait dans sa diversité l’attrait de Versailles.
Lorsque je suis arrivée, on m’a dit tous les jours « On vous pardonnera toujours de voir trop grand, on ne vous pardonnera jamais de voir trop petit ». La recommandation était sans doute judicieuse mais je crois qu’aujourd’hui, il faut aussi voir les choses autrement. Etre plus créatif, plus ingénieux, plus ouvert aux autres pour faire vivre nos collections et pour faire vivre cette maison.
Pour imaginer l’avenir, peut-être faut-il se retourner sur le passé. Gérald van der Kemp, quand il a quitté en 1980 le château de Versailles après avoir été pendant 27 ans le conservateur en chef de ces lieux, avait tout à fait changé déjà Versailles. Quand il y était rentré, il avait dit : « Il faut que ce lieu redevienne grand, beau à regarder comme il l’était du temps du Roi, qu’il soit le symbole de l’élégance française, du raffinement, du goût ». Il fallait pour cela le remeubler, le vêtir, le dépoussiérer. Ce viatique, qui était celui de Gérald van der Kemp, eh bien, il est le nôtre, il sera demain celui de mes successeurs.
Le choix stratégique que nous avons maintenu avec opiniâtreté depuis un siècle de restituer ainsi le cadre de vie de Cour, où se côtoient fastes des appartements d’apparats et finesses des décors des appartements privés, a définitivement ranimé l’esprit d’une maison royale, loin de l’immobilité un peu figée d’un musée.
Versailles n’est pas un musée, Versailles est une résidence royale qui vit encore. Mobilier original, équivalence, restitution, reconstitution ont métamorphosé la première offre culturelle du château, et quand je dis la première offre culturelle du château, c’est évidemment sa visite. Il y faut du temps. Un temps très long.
Le début du remeublement du salon des jeux, achevé en 2012, aura commencé en 1953 par le retour dans cette même pièce de deux encoignures. Les travaux engagés dans les années 1980, dans les appartements des Enfants de France, demeuraient inachevés 30 ans plus tard, par manque de crédits. L’objectif poursuivi sans interruption depuis les années 1950 aura donc été de faire comprendre au plus large public la fonction, la vie de ces lieux.
C’est toujours la volonté de donner à des visiteurs venus d’horizons géographiques et culturels toujours plus divers, l’écho de leurs rêves quand ils viennent à Versailles. Notre rêve à nous, c’est d’ouvrir toujours davantage le livre d’histoire – comme disait Victor Hugo – qui est Versailles. De montrer par exemple les collections que Louis-Philippe avait rassemblées pour créer le musée de l’histoire de France, inauguré en 1837. Elles sont d’une richesse insoupçonnée. 7 000 peintures et beaucoup plus encore de sculptures.
A l’occasion des Journées du patrimoine, j’ai voulu ouvrir l’aile du Midi, cette aile qui n’est pas ouverte depuis les années 1980 alors qu’elle est en parfait état, alors qu’elle pourrait être montrée tous les jours, mais elle ne l’est pas par manque de crédits et parce que nous n’avons pas assez de personnels pour ouvrir ces salles. Pendant deux jours donc, nous les avons ouvertes pour les Journées du patrimoine. Pendant deux jours, 12 000 personnes sont venues à Versailles les admirer.
C’est dire qu’il y a encore des richesses insoupçonnées à Versailles et je suis toujours étonnée, par exemple, que ceux qui connaissent très bien ce domaine en ignorent encore certaines parties. Par exemple, Trianon-sous-Bois, beaucoup, et même des ministres de la République d’aujourd’hui et d’hier ne savent pas que le Général de Gaulle en avait fait une résidence présidentielle et que l’on peut encore y voir son lit.
Dans notre volonté de montrer Versailles autrement, et notamment aux Français, aux Européens qui y reviennent, il y a tous ces chemins à explorer. Et puis, comme je l’évoquais tout à l’heure, il y a d’autres champs à ouvrir, parfois modestes, non pas encore une fois par leur qualité mais par rapport aux publics auxquels ils s’adressent. C’est ainsi que l’an dernier j’ai voulu que l’on crée une collection de poésies. Et donc, nous avons demandé à des poètes d’écrire sur Versailles. Cela ne s’était pas fait, je crois, depuis le début du XXe siècle. Nous avons publié un petit livre de poésies. Alors, évidemment, c’est modeste parce que l’on peut dire que la poésie, aujourd’hui, ne fait pas le buzz, mais enfin, c’était une manière de s’adresser à un autre public.
De la même façon, nous avons lancé – et je choisis à dessein un exemple diamétralement opposé – nous avons lancé, il y a quelques semaines, une ligne de légumes oubliés. D’ailleurs, ils sont faits non loin d’ici. Et donc, avec la marque Château de Versailles. Et c’est la rencontre – parce que ce sont toujours des rencontres – c’est la rencontre de ce monsieur, Bernard Lafon qui cultivait ses légumes dans le Sud-Ouest et qui était passionné de Versailles et qui, à 60 ans, a décidé de remettre tout son argent sur la table pour créer cette ligne de produits en nous demandant de les estampiller « Versailles ». Ce sont des produits bio, alors nous sommes sauvés ! Et donc, il va partir dans le monde entier avec ses produits. Et je pense que ce sera, d’une manière certes anecdotique, mais une façon, encore une fois, de parler de Versailles autrement.
Car le problème que nous rencontrons aujourd’hui, c’est qu’il faut que nous affirmions, je crois, de mille façons, la diversité de ce que nous sommes. Et les méandres des réseaux sociaux ne sont pas les moindres, même si on n’en parle guère, voire pas du tout. Je ne vous donnerai qu’un chiffre, le château de Versailles a accueilli, en 2012, plus de 7 millions de visiteurs. Mais sur son site, il en a reçu virtuellement plus de 10 millions. Et la Galerie de l’histoire du château, que nous avons ouverte l’an dernier, et qui mêle, grâce au soutien de Google, cela aurait pu être affreux, représentations en trois dimensions et œuvres de nos collections, est un immense succès. Et je crois que c’est un immense succès parce que, justement, Google a fourni les tuyaux mais les contenus sont les nôtres. Et qu’il n’y a pas de perversion à utiliser les moyens modernes de communication quand simplement on sait les dominer et les maîtriser. Et je crois que c’est ce que nous sommes parvenus à faire à Versailles.
Parce que, qu’on le regrette ou pas, les nouveaux médias deviennent les premiers prescripteurs dans le domaine de la culture aussi. Sachez par exemple, que la chaîne YouTube du château de Versailles qui propose aujourd’hui plus de 200 vidéos, est la deuxième chaîne culturelle la plus consultée dans le monde, après celle du MoMa. Et je pense là aussi que ce sont des choses que nous ne savons pas mais nous pouvons ainsi rivaliser avec les pays les plus expérimentés en matière de nouvelles technologies.
En 2013, nous avons lancé deux nouveaux projets qui me semblent aussi illustrer cette démarche d’exprimer une différence dans un lieu qui pourtant ne change pas. Pour la première fois, à l’occasion de la restauration du Bassin de Latone, le plus grand bassin du château de Versailles, nous avons voulu montrer un chantier connecté, dont l’évolution est accessible sur les terminaux mobiles des visiteurs des jardins. On leur permet ainsi de partager les grands moments des travaux. On met en valeur les métiers d’art de Versailles. On permet aux internautes d’interroger les fontainiers, les jardiniers et les architectes.
Dans le cadre de cette même année Le Nôtre, puisque nous fêtons cette année le 400e anniversaire de la naissance du jardinier du Roi, nous avons créé une application de visite des jardins qui permet aux visiteurs de se géolocaliser. Le mot n’est pas très joli mais cela veut dire que lorsque l’on passe devant une statue, le téléphone vibre pour proposer une explication en vidéo immédiate.
Et de la même façon, j’ai voulu lancer – et cela, j’y suis très attachée – une visite à la carte, une visite avec le guide de son choix. Nous avons commencé, avec le soutien d’Orange, par demander à Erik Orsenna de faire une visite des jardins. Donc, aujourd’hui, on peut visiter les jardins avec Erik Orsenna ou avec Giuseppe Penone qui a accepté de faire le même exercice. Demain, j’espère convaincre des comédiens, des jardiniers anglais de venir dire qu’ils préfèrent les jardins anglais aux jardins français. Et puis, peut-être des étrangers. Venir exprimer leur regard sur les jardins de Versailles.
Vous le voyez, c’est une façon pour nous d’ouvrir de nouvelles perspectives. L’hétérogénéité et l’évolution de notre public, je le répète, nous y conduisent. C’est d’ailleurs toute la difficulté qu’il y a à vouloir satisfaire à la fois un tourisme de masse et en ne cédant sur l’exigence culturelle. Ce qui, pour les années qui viennent, doit peut-être nous faire réfléchir le plus, ce n’est pas tant le nombre de nos visiteurs que leur origine.
Songez que si les Américains demeurent les premiers visiteurs étrangers de Versailles, -ils sont maintenant en première position certes – ce sont les Chinois qui arrivent, comme je le disais, en deuxième position. Bientôt talonnés par les Brésiliens et peut-être rejoints par les Australiens. Qui l’aurait cru, il y a une dizaine d’années.
Il nous faut nous ouvrir à d’autres cultures pour comprendre ce que ces nouveaux visiteurs attendent de la nôtre, même s’ils ont, comme point commun, d’être fascinés par elle. Je suis allée en juin dernier au Brésil, invitée d’une université et d’une fondation très importante du Nord du pays, Fortaleza. Alors, là aussi, j’avais eu la faiblesse de dire : « Je parlerai de ce que vous voudrez ». Et j’ai été très étonnée que l’on me demande de parler du luxe à la française.
Et en fait, quand j’ai expliqué qu’au fond, que Bernard Arnault, lors d’un récent conseil d’administration, avait dit que la meilleure image de Dior, c’était les jardins de Versailles, eh bien, on pouvait faire un résumé de notre histoire, de cette histoire qui commence, comme je le disais tout à l’heure avec Louis XIV et le goût du roi pour la création quelle qu’elle soit, à condition qu’elle soit de qualité, et ce fil, on peut le tirer jusqu’à Monsieur Dior, qui déjà, en 1950, venait photographier ses mannequins dans les jardins de Versailles.
Et Bernard Arnault n’a rien inventé puisque, aujourd’hui, il recommence. Et non seulement il recommence à filmer ses mannequins à Versailles mais en plus il en devient l’un des plus grands mécènes puisque la semaine dernière nous avons signé le mécénat pour la restauration du Hameau de la Reine. C’est dire que ce lien n’est pas seulement un lien historique ou un lien d’image, c’est, je crois, un lien qui devrait être dans nos gènes à tous puisque nous exprimons de la même façon la France à travers nos missions respectives.
En Chine, de la même façon, l’an dernier, j’avais ressenti cet intérêt pour l’art de vivre qu’incarne le Grand Siècle. Je l’avais ressenti encore plus, puisqu’on me parlait, là, des vins de Bordeaux, de la gastronomie et de Versailles. J’en parlerai plus longuement si vous m’interrogez tout à l’heure.
Et en même temps, les Japonais, eux, évoquent d’abord Marie-Antoinette. Alors, ils sont fanas de Marie-Antoinette. Nous allons faire en 2015 une exposition Marie-Antoinette à Tokyo et à Kyoto à leur demande. En revanche, les Pays du Golfe, eux, se passionnent pour Louis XIV. C’est dire que chacun jusqu’au bout du monde porte son Versailles.
Ce rêve incarné de la culture française, au sens le plus large du terme, c’est aussi ce qui nourrit l’intérêt de nos mécènes qui bien sûr accompagnent le mouvement vers nous de leur pays. De ce point de vue, il se passe dans ces pays lointains quelque chose qui doit ressembler à ce que découvraient les Américains au début du XXe siècle et plus précisément entre les Deux Guerres. Tous les témoignages de l’époque le montrent. Versailles n’était pas seulement notre livre d’histoire, il était le lieu du raffinement, l’arbitre du beau et de la perfection.
Je suis convaincue que les Chinois, quand ils entrent à l’Opéra royal ou les Brésiliens quand ils arrivent au Petit Trianon ont également le souffle coupé. C’est ainsi que les plus aisés d’entre eux en deviendront aussi les mécènes – je l’espère – et en tout cas les meilleurs ambassadeurs de Versailles en pensant qu’il s’agit, comme on dit en anglais, de Place to be. Car, comme j’ai pu le dire récemment au ministre des Affaires étrangères qui veut relancer la diplomatie culturelle, Versailles reste, par l’histoire qu’il tisse, immanquablement avec ceux qui s’y arrêtent, un atout majeur pour la France.
Pour résumer d’un mot, car je crois que j’ai déjà été trop longue, je crois que la force de ce château, qu’aucun autre ne peut vraiment lui disputer, c’est le désir qu’il suscite, ce sont les rêves qu’il nourrit. Et moi, j’ai un petit peu pris ces rêves en chemin et je voudrais simplement que vous croyiez que ma passion est totale pour que ce rêve vive encore longtemps.
Merci.