Prix Montaigne 2022 décerné à Raphaël Doan
Le jury du Prix littéraire Montaigne présidé par Xavier Darcos, Chancelier de l’Institut, a choisi de décerner le Prix 2022 au jeune et très talentueux Raphaël Doan pour son ouvrage « Le rêve de l’assimilation de la Grèce Antique à nos jours » (Passés Composés, 2021).
Il a été remis par Pierre Hurmic, maire de Bordeaux, en présence de Jean-Pierre Rousseau, Grand Chancelier de l’Académie du Vin de Bordeaux, jeudi 7 avril à l’Hôtel de ville.
Raphaël Doan, à Bordeaux pour la première fois, a reçu son prix devant la statue de Michel de Montaigne qui a été maire de Bordeaux de 1581 à 1585. Son discours s’est conclu par quelques mots sur ce que l’assimilation avait apporté aux vins de Bordeaux : « En France, nous avons eu une tradition ancienne, très ancienne, d’ouvrir nos communes imaginations. On en retrouve la trace même dans le vin de Bordeaux. En matière d’histoire du vin, et de vin tout court, d’ailleurs, je suis un pur néophyte, et je ne voudrais pas dire de bêtises devant tant d’experts réunis. Mais j’ai été surpris, après quelques lectures, d’y retrouver quelques liens à l’assimilation. Les premiers à avoir cultivé la vigne en Aquitaine étaient des Gaulois, les Bituriges – ce qui signifie littéralement en gaulois « les rois du monde », rien que ça. Or, d’une part, eux-mêmes étaient des immigrants qui s’étaient déplacés de leur territoire originel de Bourges vers l’Aquitaine à l’occasion de la Guerre des Gaules. D’autre part et surtout, ces Gaulois, comme les autres, n’étaient à l’origine pas de grands amateurs de vin. La boisson préférée des Gaulois, c’était la bière. Ce n’est qu’après la conquête romaine que le vin, la boisson méditerranéenne par excellence, se répand en Gaule, à la fois sa consommation et sa production. Si les Bituriges ont commencé à boire puis à produire du vin (celui déjà apprécié sous le nom de Biturica), c’est parce qu’ils se sont romanisés, c’est-à-dire qu’ils se sont assimilés aux mœurs romaines – et il faut dire que le goût du vin est probablement, de toutes les coutumes romaines, la plus facile à assimiler.
C’est d’ailleurs le même phénomène de romanisation qui a permis à la ville de Burdigala, d’abord reléguée au rang de cité pérégrine stipendiaire, c’est-à-dire le pire statut des villes de l’Empire dont, Monsieur le Maire, le mille-feuille territorial n’avait rien à envier au nôtre -, jusqu’à celui de capitale de province dotée du droit latin et foyer de plusieurs grands écrivains et poètes romains.
Bref, sans la Guerre des Gaules, pas d’assimilation romaine dans le Bordelais ; sans assimilation romaine, pas de vin des Bituriges, pas de Burdigala capitale d’Aquitaine ; sans vin des Bituriges, sans Burdigala, pas d’Académie du vin de Bordeaux, pas de prix Montaigne et, par conséquent, je ne serais pas devant vous en cet instant ; mon dernier remerciement ce soir devra donc, nécessairement aller à Jules César ».